Les Canadiens ont commencé à payer plus cher leurs produits d’épicerie, et d’autres augmentations sont attendues cet automne puisqu’une grave sécheresse fait grimper les prix des produits agricoles.

Au Bon Ton Meat Market de Calgary, le propriétaire Greg Keller a souligné que la flambée des prix du boeuf au détail, ces deux derniers mois, avait été « incroyable ».

« Certains articles ont augmenté de 10 % à 15 %, certains articles ont augmenté de 20 %, a-t-il affirmé. Je n’ai jamais vu des marchés aussi volatils, et j’exerce ce métier depuis longtemps. »

Selon Statistique Canada, le prix du bifteck de ronde est passé de 17,97 $ le kilo en mars à 19,05 $ le kilo en juillet. Le rôti de côte de boeuf est passé de 36,66 $ le kilo à 41,39 $ le kilo.

« Quand nous avons vu les prix commencer à grimper, nous avons commencé à acheter beaucoup de stocks, a raconté M. Keller. Et, Dieu merci, je l’ai fait (…) parce que cela me scandalise. »

Le prix de la farine, des céréales et de certains produits alimentaires a également augmenté depuis le printemps, et d’autres augmentations sont attendues cet automne.

Un certain nombre de facteurs sont à l’origine du récent choc des autocollants, notamment la croissance de la population mondiale qui stimule la demande à long terme de nourriture, ainsi que la faiblesse du dollar canadien et la réouverture des restaurants, avec la levée des restrictions de santé publique contre la COVID-19.

Cette année, cependant, les prix des épiceries sont également touchés par la chaleur extrême et la sécheresse qui affligent les agriculteurs et les éleveurs canadiens.

Le directeur du Laboratoire d’analyse agroalimentaire de l’Université Dalhousie, Sylvain Charlebois, a indiqué qu’il s’attendait à une augmentation annuelle globale des prix des aliments de 5 % en moyenne, ce qui signifie que les familles canadiennes pourraient dépenser cette année près de 700 $ de plus en épicerie que l’an dernier.

« C’est probablement la plus forte hausse des prix des aliments de l’histoire récente, en dollars (non corrigés de l’inflation), a affirmé M. Charlebois. Et je pense que le pire est encore à venir. »

Les conditions de culture ont été si mauvaises dans l’Ouest canadien que Statistique Canada prévoit maintenant les récoltes de blé des agriculteurs seront inférieures de 35 % à celles de l’an dernier.

La production canadienne de canola devrait diminuer de 24,3 % cette année pour atteindre son plus bas niveau en une décennie, à 14,7 millions de tonnes. La production d’orge devrait quant à elle chuter de 27 % d’une année à l’autre et celle d’avoine devrait plonger de 32,9 %, selon l’agence fédérale.

Tom Steve, directeur général de la Commission du blé de l’Alberta, a indiqué que la sécheresse avait également été un problème cette année dans d’autres grands pays producteurs de récoltes, notamment les États-Unis et la Russie.

« Avec une récolte beaucoup plus petite, il y aura beaucoup de pression à la hausse sur les prix et la disponibilité pure, a souligné M. Steve. Cette sécheresse aura certainement un impact sur le consommateur. »

Déjà, le canola se négocie à près du double de ses niveaux habituels, à 20 $ le boisseau. Le blé de printemps canadien oscille autour de 11 $ le boisseau, alors que normalement « les agriculteurs seraient satisfaits de 7 $, a observé M. Steve.

« C’est le principe de base de l’offre et de la demande, a-t-il expliqué. Les transformateurs n’auront d’autre choix que de répercuter ces prix sur les consommateurs. »

 

Impact sur le prix du boeuf

La flambée du coût des céréales fourragères est l’une des raisons pour lesquelles les consommateurs voient les prix du boeuf grimper, a expliqué Brian Perillat, directeur et analyste principal chez Canfax, la branche d’analyse de marché du groupe de l’industrie Canadian Cattlemen’s Association.

« Au cours des deux dernières années, nous avons vu les prix de l’orge doubler. Ils sont passés de 4 $ le boisseau à plus de 9 $, a noté M. Perillat. C’est un intrant majeur pour la production de boeuf. »

M. Perillat a ajouté que le plein impact de la sécheresse sur les prix de la viande n’avait pas encore été atteint. On estime que jusqu’à 20 % du cheptel bovin canadien pourrait être liquidé, car les éleveurs qui n’ont pas les moyens de nourrir leurs animaux sont obligés d’abattre leurs troupeaux.

« Nous prévoyons que les approvisionnements (de bovins) vont baisser au cours des deux prochaines années, a poursuivi M. Perillat. Et cela signifie que les prix vont augmenter. »

M. Charlebois a souligné que les agriculteurs qui réussissent à traverser cette année avec une récolte récupérable bénéficieront des prix élevés des produits de base. Mais les prix signifient peu pour ceux dont les champs sont brûlés et secs, a-t-il précisé.

« Si vous êtes agriculteur et que vous avez quelque chose à vendre, vous gagnerez beaucoup d’argent. Mais vous avez besoin de quelque chose à vendre », a-t-il souligné.

 

SOURCE – Amanda Stephenson, La Presse canadienne