Lorsque le commun des mortels s’imagine ce à quoi ressemble la pêche commerciale, ce qui lui vient à l’esprit sont généralement des images de petits bateaux quittant un port de la Gaspésie, ou encore de navires, quelque part en haute-mer, sur lesquels sont tirés de grands filets gorgés de poissons. Mais pourquoi concevoir la pêche comme quelque chose de si lointain? En effet, il se trouve également sur les Grands Lacs des pêcheurs professionnels qui sillonnent les eaux pour en rapporter des poissons destinés à se retrouver sur le marché.
Leur utilité comme voie de transport a peut-être occulté ce fait mais oui, des tonnes de poissons sont pêchées chaque année dans les Grands Lacs. Comme dans les autres zones de pêche, le chiffre d’affaires de cette activité commerciale se calcule en millions, le revenu de certaines familles en dépend et les gouvernements la réglementent tout en surveillant de près ses conséquences environnementales.
C’est dans le lac Érié que se concentre 80 % de la valeur globale des prises commerciales dans les Grands Lacs. Son climat tempéré et sa faible profondeur en font un habitat idéal pour les poissons qui y abondent davantage qu’ailleurs. Le port d’attache de la majorité des pêcheurs se trouve à Port Dover, Port Stanley, Kingsville ou Wheatley Harbour. On trouve dans ces deux dernières villes quelques-unes des plus importantes usines de transformation de poissons d’eau douce au Canada.
Le gouvernement provincial délivre les permis de pêche dont les titulaires ont, en 2011 (plus récentes données disponibles sur le site du ministère des Richesses naturelles), pris 12 000 tonnes métriques de poissons d’une valeur de 33 millions de dollars. Il s’agit dans ce cas de la valeur à quai, c’est-à-dire avant même que le poisson ne soit transformé. En tout et pour tout, lorsque sont pris en compte les opérations commerciales subséquentes jusqu’à la vente du produit dans les magasins d’alimentation et les restaurants, la valeur des transactions dont a bénéficié l’économie ontarienne se chiffrait en 2011 à 234 millions de dollars.
L’Ontario a un accès à quatre des cinq Grands Lacs. Différentes espèces commerciales caractérisent chacun d’eux. La perchaude et le doré constituent l’essentiel des prises dans le lac Érié. Ces deux espèces se trouvent également dans le lac Huron, de même que le touladi et surtout le grand corégone. La principale espèce commerciale du lac Supérieur est aussi le grand corégone, mais le cisco y est également fort prisé pour ses œufs. Quant au lac Ontario, c’est la perchaude et le crapet-soleil qui constituent la plupart des prises. D’autres espèces y sont pêchées et, fait intéressant, le gouvernement tente présentement d’y réintroduire le saumon de l’Atlantique, disparu de ses eaux il y a plus d’un siècle.
Cette année, la saison de la pêche débutera plus tard qu’à l’habitude en raison de la glace qui emprisonne les Grands Lacs, conséquence de l’hiver exceptionnellement rude qui a affligé le continent au cours des derniers mois. Il ne semblerait pas cependant que cela entraîne des conséquences fâcheuses pour les pêcheurs. Les circonstances pourraient même leur être favorables puisque la couche de glace fait baisser le niveau d’oxygénation de l’eau, ce qui est particulièrement néfaste pour l’alose à gésier, une espèce envahissante qui nuit aux poissons recherchés par les pêcheurs.