Le consumérisme des Américains est bien connu. Chaque année, à l’occasion de rabais d’importance, il se trouve une foule de gens pour attendre des heures aux portes des commerces pour ensuite s’y précipiter avec frénésie dès leur ouverture. Étrange spectacle qui étonne toujours la majorité des Canadiens. Pourtant, ces derniers sont de plus en plus nombreux à succomber à l’appel des détaillants et à tenter de profiter des rabais liés au temps des Fêtes, sans autant de ferveur que leurs voisins du Sud il est vrai.
L’américanisation des pratiques commerciales a beaucoup à voir avec le grand nombre de détaillants originaires des États-Unis qui se sont implantés dans le marché canadien ces dernières années. Ces chaînes de magasins ont importé leurs pratiques mais ont aussi créé une plus grande concurrence, forçant tout le monde à davantage d’effort pour attirer les consommateurs. Qui plus est, les commerces canadiens situés près de la frontière doivent se mesurer directement à leurs rivaux américains qui ont toujours détourné à leur avantage de nombreux clients du Canada.
Auparavant, les magasins pouvaient se permettre de maintenir leurs prix relativement élevés jusqu’à Noël, sachant que les acheteurs sont moins réfractaires à débourser en cette saison, pour ensuite liquider leur stock à l’occasion du « Boxing Day » et des jours suivants. De nos jours, la compétition et, sans doute, le désir de stimuler l’envie d’acheter plus tôt, ont donné naissance au « Black Friday ». Cette journée consacrée aux escomptes est ainsi nommée parce que, paraît-il, les détaillants troquent à partir de cette date le stylo rouge pour le stylo noir lorsqu’ils écrivent dans leurs livres de compte. Cette période de rabais pour les consommateurs en est donc aussi une de profits élevés pour les vendeurs, qui d’ailleurs ne se contentent plus d’un simple vendredi, le « Black Friday » s’étirant maintenant sur plusieurs jours à la fin de novembre et au début de décembre.
La popularité de cette pratique est difficile à cerner avec précision mais elle est incontestablement en croissance. Selon un sondage mené par la firme Accenture cet automne, 61 % des Canadiens ont répondu planifier de faire des achats lors de cette période. L’année dernière, la Banque de Montréal avait elle aussi sondé la population et estimé à 47 % la proportion de consommateurs décidés à faire des achats lors du « Black Friday », alors qu’il n’était que 41 % en 2012. Cette tendance à la hausse s’observe aussi dans les données d’une étude d’IPG Mediabrands, rendue publique il y a quelques semaines. Dans ce cas, 49 % des répondants ont dit qu’ils feraient quelques achats lors du « Black Friday » ou du « Cyber Monday ». Ce deuxième évènement est une création des détaillants américains qui, comme son nom l’indique, mise sur les achats en ligne. L’étude va plus loin jusqu’à décortiquer l’impact de ces aubaines sur la productivité des travailleurs : environ 5 millions de gens auraient l’intention de s’absenter du travail pour courir les magasins et 2,3 millions vont faire des emplettes sur leurs heures de travail (que ce soit en ligne ou en magasin). Ce sont 13,4 milliards de dollars qui seront dépensés à l’occasion de ces quelques jours de consommation. À ce propos, la firme Deloitte prévoit d’ailleurs que, comparée à la même période de l’année dernière, la valeur des ventes au détail devrait augmenter de 2,0 à 2,5 % au cours des prochaines semaines. Un autre cabinet d’audit financier, Ernst & Young, prédit également une hausse estimée à 3,3 %.
Il est important de faire des recherches avant de se lancer dans le magasinage. Faire une liste des articles désirés, comparer les prix demandés par les différentes boutiques, faire un budget, jeter un coup d’œil au taux de change pour ceux qui auraient l’intention de faire le saut aux États-Unis pour l’occasion sont quelques-unes des astuces élémentaires qui peuvent rendre les aubaines encore plus profitables pour le consommateur. Le 28 novembre prochain, avant de sortir le portefeuille de sa poche, le bon sens et la vigilance seront donc de mise.