Au cours de la semaine du 16 avril, les séances de consultation se sont succédé à London et à Sarnia pour connaître le vécu et les besoins des francophones en matière de soins de santé. Ce vaste projet, rappelons-le, est né d’une initiative de la Table Franco-Info et particulièrement, dans ce cas-ci, de l’Entité 1. Différents groupes (aînés, adolescents, familles, dirigeants d’organismes, etc.) ont été rassemblés pour répondre aux questions de la consultante de la firme PGF, Kéïla Fontaine.
Les thématiques générales étaient chaque fois les mêmes mais l’approche et les questions étaient adaptées en fonction des gens. De ses interactions avec les neuf groupes approchés, Mme Fontaine a constaté que quelques grandes tendances se dégageaient. Les participants ont souvent souligné qu’ils découvrent les services par hasard, qu’il n’y a pas d’offre active, que l’incompréhension linguistique peut engendrer de l’isolement et des risques pour la santé, etc. Certains ont exprimé leur désir d’avoir davantage d’autonomie en n’étant pas obligés, par exemple, de recourir à un interprète; d’autres ont fait part de leur inconfort à l’idée de paraître pour un francophone capricieux face à un personnel anglophone; d’autres encore ont manifesté leur intérêt pour la télémédecine et insisté sur la nécessité de donner une meilleure visibilité aux soins de santé offerts en français.
Parmi les groupes consultés, celui des membres de la Table Franco-Info se distinguait en ce qu’il réunissait non pas seulement des consommateurs de services mais aussi des fournisseurs de services, dont plusieurs liés au domaine de la santé. C’est donc au point de vue de ces professionnels bien au fait des ressources disponibles que Kéïla Fontaine s’est intéressée dans la matinée du jeudi 19 avril.
Question après question, la consultante a dressé le portrait de leurs perceptions et de leurs constats. À propos des défis d’accès et de leurs répercussions, les participants en avaient long à dire. Ils ont ainsi mentionné que les services en français n’étaient pas clairement identifiés, souvent débordés et que les travailleurs de ce domaine ne veulent pas toujours être identifiés comme bilingues par crainte d’être surchargés de travail. Par contre, leur connaissance du français n’est souvent que rudimentaire et les traductions disponibles parfois médiocres. Qui plus est, la conviction selon laquelle les services en français sont superflus parce que tout le monde comprend l’anglais est encore fort répandue.
Les participants ont partagé quelques exemples intéressants de situations où des services en français eurent été indispensables : blessures à la tête qui fait momentanément perdre l’usage d’une seconde langue, crise émotionnelle qui rend l’usage de l’anglais plus difficile, danger fréquent de diagnostic erroné en santé mentale, etc.
D’autres problèmes ont été relevés. Ainsi, considérant les circonstances actuelles, se pose pour plusieurs le dilemme entre des soins en français et des soins de qualité. La proximité physique et le temps d’attente sont souvent problématiques. Il est aussi difficile de faire des suivis médicaux en français et de comprendre des termes techniques en anglais.
La liste des besoins à combler était intéressante en ce qu’elle reflétait la société dans son ensemble : création de programmes de jour pour les aînés, amélioration des soins à domicile et de longue durée, nécessité d’attirer dans la région des médecins francophones et d’avoir du personnel bilingue à l’urgence, établissement d’une option en français pour les appels au 911, perfectionnement de l’adéquation entre l’offre et la demande par un système de navigation du système de santé et autres.
Au chapitre des solutions, les membres de Franco-Info étaient tout aussi loquaces. Éduquer les administrations du système de santé sur la façon dont elles déploient et identifient leur personnel s’avère une nécessité qui a fait consensus. Fait intéressant, un participant a souligné que c’est à London que se donnent les traitements spécialisés de divers problèmes de santé graves et que des francophones de partout en province doivent y séjourner. Conséquemment, il faudrait faire comprendre aux hôpitaux que ces patients sont parfois pris au dépourvu dans un environnement quasi exclusivement anglophone et qu’il est nécessaire de remédier à cette situation. Au plan local, il y a aussi des patients francophones ou bilingues qu’il faudrait identifier comme tel, d’autant plus que les erreurs de diagnostic nées de conversations hasardeuses au plan linguistique engendrent de plus grands coûts au système de santé.
Une autre innovation souhaitée fait présentement l’objet de démarches pour qu’elle voit le jour : la mise sur pied d’un centre de la famille indépendant jumelé à un centre de santé communautaire francophone.
En considérant les derniers jours qui ont été très occupés, Kéïla Fontaine et Fairouze Touni, coordonnatrice de la consultation, dressent un bilan globalement positif en termes de participation et de réponses. Le mois d’avril tire à sa fin et avec lui ce grand coup de sonde qui fera ensuite place à l’analyse.
PHOTO : Les participants issus de la Table Franco-Info ont partagé leurs connaissances et leurs impressions personnelles.