Le 11 janvier, pour la deuxième fois depuis qu’il est devenu premier ministre, Justin Trudeau rencontrait la population de London dans le cadre d’une séance de questions-réponses. C’est de nouveau à l’Université Western que le public fut invité en soirée.

Toutes les places de l’auditorium Alumni Hall étaient occupées et presque exclusivement par des étudiants universitaires, un électorat largement sympathique à M. Trudeau. Ceci explique la complaisance des questions et des réactions de l’assistance au cours des 90 minutes qu’a duré la rencontre. Ainsi, les questions abordées relevaient assez souvent des thèmes de prédilection du premier ministre. Dans une veine plus personnelle, quelques enfants, amenés par leurs parents, ont aussi eu l’occasion de sonder le politicien sur son vécu.

M. Trudeau désignait au hasard des participants désireux de poser une question et la première personne à prendre la parole s’est enquis de la manière dont le gouvernement contribuait à l’avancement des femmes dans des secteurs traditionnellement masculins telles que les sciences et la technologie. Le premier ministre a saisi la balle au bond pour se dire féministe, un de ses arguments d’autopromotion favoris, et pour vanter les réalisations de son parti en la matière. Il a notamment rappelé que Navdeep Bains, ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique, a lancé l’année dernière un programme pour inciter les jeunes, et particulièrement les filles, à apprendre les bases de la programmation informatique.

La qualité de vie des Autochtones est un sujet qui est revenu à quelques reprises. Un participant a attiré l’attention du premier ministre sur cette question en pointant les conditions d’existence déplorables caractérisant certaines communautés. M. Trudeau a expliqué que ces problèmes nécessitent des investissements importants en infrastructures et en ressources humaines auxquelles son gouvernement porte attention mais que cinq ans pourraient être nécessaires pour réaliser tout ce qui doit être fait.

Le sort des immigrants qualifiés qui ne trouvent pas d’emploi dans leur domaine fut mis sur la sellette par une dame. M. Trudeau a reconnu que des efforts doivent être faits pour solutionner ce problème. Cela passera notamment par une meilleure reconnaissance des compétences acquises à l’étranger par les ordres professionnels.

Les personnalités politiques ne dédaignent jamais interagir avec les enfants, un exercice des plus faciles qui leur permet de présenter une facette plus aimable de leur personnalité. À la question d’un jeune lui demandant quel est son plus grand défi comme premier ministre, Justin Trudeau a répondu que c’était de rassembler 36 millions de citoyens différents les uns des autres et de concilier son travail avec sa vie de famille. Un autre lui a demandé comment il composait avec ceux qui le détestent et le chef libéral a dit qu’il ne se laissait pas définir par les autres.

Cependant, c’est également un enfant qui a posé une des questions ayant le plus contraint le premier ministre à improviser laborieusement. Qu’est-ce que la culture canadienne? Affirmant d’emblée et avec certitude que les Canadiens sont distincts des Américains, M. Trudeau s’est ensuite empêtré dans des généralités sur le multiculturalisme et la charte des droits et libertés pour conclure bizarrement, et en contradiction avec sa première assertion, qu’il est impossible de spécifier quoi que ce soit sur la culture canadienne.

À l’autre extrémité du spectre générationnel, une dame âgée a aussi mis le premier ministre dans l’embarras évoquant le thème de la réforme du système électoral. Cette intervention était intéressante en ce sens que la promesse brisée de M. Trudeau à cet égard est souvent mise de l’avant par les protestataires à l’extérieur des lieux de rassemblement, mais à peu près personne ne l’aborde jamais à l’intérieur. Sur cette question, le premier ministre s’est contenté de dire qu’il n’a pas les moyens d’aller de l’avant avec cette réforme sans détailler ce qu’il entendait par là.

Malgré les réponses parfois vagues du premier ministre, l’assistance se faisait toujours un plaisir de l’appuyer par ses applaudissements. Mais certains ne l’entendaient pas ainsi : en effet, dans ce type d’évènement public rassemblant des centaines de participants, il s’en trouve toujours au moins un pour faire du chahut. Au cours de la soirée, l’animosité de deux protestataires a forcé les services de sécurité à intervenir pour les expulser. Leurs doléances portaient sur l’apparente mollesse de Justin Trudeau à l’endroit des terroristes et la décrépitude morale des juges.

Droits humains à l’étranger, développement des technologies liées à l’intelligence artificielle, injustices fiscales, etc. : des sujets parmi les plus divers ont été abordés au cours de la soirée. Quelques membres du cabinet étaient également présents. Il s’agissait de la troisième rencontre publique de cette tournée hivernale dont l’objectif est de mettre la population en contact direct avec le premier ministre.

 

PHOTO : Le premier ministre a échangé avec de nombreux citoyens.