Après 15 ans de gouvernement fortement marqué à gauche sous les libéraux, les progressistes-conservateurs de Doug Ford ont entrepris de transformer en profondeur les programmes sociaux afin de juguler le déficit public. Si certaines décisions sont critiquées pour leur arbitraire, d’autres s’inscrivent dans un processus de consultation et c’est justement ce à quoi étaient conviés des francophones de partout en Ontario le 26 avril dernier.

En effet, dans le but d’améliorer les soins de santé et d’éliminer l’engorgement dans les hôpitaux (la « médecine de couloir ») d’une façon qui réponde aux attentes de la population, le Conseil du premier ministre qui se consacre à ces questions a entrepris de donner la parole aux Franco-Ontariens.

Par l’entremise d’un webinaire, les communautés de langue française de 16 villes ont participé en simultané à un échange avec la docteure Suzanne Filion, vice-présidente de l’Hôpital général de Hawkesbury et district. Avec la collaboration de facilitateurs dans chaque site, elle a guidé les participants à la consultation en leur expliquant la démarche à suivre et en donnant maintes informations sur les intentions du gouvernement.

À London, c’est au Centre Desloges qu’ont été invités des leaders de la communauté, des intervenants en santé et des patients. Les deux facilitateurs étaient Paul Levac, de l’Entité de planification des services de santé en français Érié St-Clair/Sud-Ouest, et Suzy Doucet-Simard, du Réseau local d’intégration des services de santé (RLISS) du Sud-Ouest. Une quinzaine de personnes avaient répondu à l’invitation.

Dans un premier rapport rendu public en janvier dernier (Soins de santé de couloir : un système sous tension), le Conseil du premier ministre mettait fortement l’accent sur le point de vue de la population. Les témoignages de plus de 340 patients avaient été recueillis et il se dégageait de leurs propos un grand inconfort face au peu d’intimité et au stress lié à leur passage à l’hôpital. Ces cas sont loin d’être rares : au cours d’une journée moyenne, en 2018, environ 1000 patients hospitalisés ont reçu des soins dans un endroit non conventionnel (tels un couloir ou une salle de réunion) ou sur une civière aux services des urgences.

Le rapport en arrivait à trois grandes conclusions : les patients et leur famille ont de la difficulté à s’orienter dans le système de santé et attendent trop longtemps avant de recevoir des soins; le système de santé est sous pression par manque de ressources et ses capacités peinent de plus en plus à répondre à la demande; une meilleure coordination à l’échelle du système serait de mise pour optimiser les investissements en santé.

Après avoir tâté le pouls de la population quant à ses expériences, le gouvernement souhaitait à présent connaître ses suggestions quant aux solutions possibles. Le webinaire visait à donner une lentille francophone à cet exercice.

Les participants devaient répondre à deux questions. Il leur fut d’abord demandé ce qui, selon eux, fonctionne bien dans le système de soins et qu’ils ne changeraient pas. À London, les participants ont convenu que bien des aspects de la médecine ontarienne leur plaisaient : gratuité, médecine spécialisée de qualité pour les problèmes chroniques, système informatisé, suivi continu avec l’entièreté du dossier accessible au médecin, etc.

La seconde question portait sur la façon dont les gens voudraient interagir avec leurs fournisseurs de soins de santé. Par vidéoconférence, par le biais d’un guichet de services unique, avec des soins mobiles ou à domicile, avec l’aide d’un navigateur pour les aider à se repérer dans le système, avec un soutien pour planifier leur quotidien après leur passage à l’hôpital, dans leur langue maternelle, etc. : les réponses ne manquaient pas non plus.

Cet exercice de consultation fut aussi l’occasion de donner aux participants un aperçu de ce que sera Santé Ontario, le nouvel organisme qui remplacera les 14 RLISS existants. Il sera constitué de quelques bureaux régionaux et d’une cinquantaine d’équipes locales qui chacune traitera du continuum complet de la santé avec un point de contact unique.

Le Conseil du premier ministre pour l’amélioration des soins de santé et l’élimination de la médecine de couloir a pour mandat de déterminer des priorités et des mesures qui mèneront à une meilleure gestion du système et à un plus grand bien-être des Ontariens. Les francophones auront au moins eu l’occasion de s’exprimer sur la question et le temps dira si le gouvernement sera à la hauteur des attentes qu’il a créées.

PHOTO : Le webinaire a rassemblé 16 communautés de partout en Ontario.