Des observateurs craignent, à la lumière à la recrudescence du nombre de cas de COVID-19 chez les jeunes, que les autorités provinciales aient permis trop tôt l’ouverture des bars.
L’administrateur adjoint de la santé publique du Canada, le Dr Howard Njoo, a déclaré le vendredi 17 juillet qu’il y avait « lieu de s’inquiéter » du nombre croissant de cas liés aux bars et aux boîtes de nuit, en particulier chez les jeunes. Il a exhorté les Canadiens à faire preuve de créativité tout en maintenant leur vie sociale.
« Chanter, socialiser et danser en contact étroit avec les autres dans des espaces fermés, dans des endroits bondés, n’est pas un bon moyen de faire la fête cet été », a rappelé le Dr Njoo.
Les experts soutiennent que l’ouverture des bars est risquée, mais ils reconnaissent aussi que le Canada a réussi à contrôler la pandémie à l’intérieur de ses frontières. L’été, disent-ils, offre aux autorités la possibilité d’offrir un soulagement social aux personnes dans un cadre contrôlé.
Le Dr Isaac Bogoch, un expert en maladies infectieuses au Toronto General Hospital et professeur agrégé de médecine à l’Université de Toronto, n’est pas surpris par les éclosions liées à des bars.
Comme tout espace intérieur où les gens se rassemblent pendant des heures, il prévient que les bars sont des endroits où les infections peuvent se propager rapidement.
« On consomme de l’alcool et on devient désinhibé, souligne le Dr Bogoch. Il est beaucoup moins probable que les gens adhèrent à des mesures de distance physiques dans ces environnements. »
Des éclosions de COVID-19 dans des bars se sont produites dans le monde entier et au Canada.
Des éclosions ont été liées à des clubs d’effeuillage et à des soirées privées en Colombie-Britannique. À Montréal, des gens ont fait la queue pendant des heures pour passer un test de dépistage après que les responsables de la santé publique l’eurent recommandé à tous ceux qui avaient fréquenté un bar depuis le 1er juillet.
On a recensé pas moins de 30 nouveaux cas liés à un bar. Le Dr Bogoch espère que le scénario montréalais servira de « réveil » pour les jeunes Canadiens en bonne santé afin qu’ils se souviennent de la façon dont la pandémie affecte les collectivités.
Comme l’a fait le directeur de la santé publique du Québec, le Dr Horacio Arruda, il a rappelé les règles cardinales : la distanciation physique, l’hygiène, comme le lavage des mains, et le port d’un couvre-visage.
Le professeur juge qu’il est inévitable de voir des jeunes dans la vingtaine et dans la trentaine se rencontrer au cours de la pandémie, que les bars soient ouverts ou non, surtout après une période de confinement émotionnellement difficile.
« Les gens sont affamés d’interactions sociales. Ils les recherchent, constate le Dr Bogoch. Plutôt que de les blâmer, nous devrions chercher des moyens de nous y prendre de manière plus sûre. »
Selon lui, les établissements pourraient distribuer des masques et installer des stations de désinfection, ou ajouter des sièges à l’extérieur pour réduire la probabilité globale de propagation.
Colin Furness, un épidémiologiste et professeur adjoint à l’École de santé publique Dalla Lana de l’Université de Toronto, craint que les gens aient tendance à atténuer ou à minimiser les risques. Il n’est pas surprenant que les jeunes tentent de se justifier de se réunir en groupe après s’être sentis enfermés pendant des mois. Surtout, ils ont entendu des messages voulant que les symptômes soient moins graves pour leur classe d’âge.
« Le sentiment de soi est à cet âge très lié aux relations sociales avec les autres. Se retrouver isolé à cause de la COVID-19, c’est vraiment très brutal, très nocif pour ce groupe d’âge », avance M. Furness.
Lui aussi pense que les gouvernements pourraient profiter d’une période de faible propagation communautaire pour modifier certains règlements pour faciliter la vie des jeunes adultes, notamment ceux concernant la consommation d’alcool en plein air.
Les autorités doivent faire preuve de prudence, mais aussi de créativité, en permettant les réouvertures des entreprises d’une manière qui répond aux besoins sociaux des gens, ajoute M. Furness.
« Il y a de la place pour la créativité. Au lieu de parler d’interdiction, comment pouvons-nous canaliser ce besoin [de rapports sociaux] d’une manière moins dangereuse? »
SOURCE – Holly McKenzie-Sutter, La Presse canadienne