Le club de lecture du Cercle des copains s’est écarté de ses habitudes lors de sa dernière rencontre. En fait, l’évènement attendu a débordé les limites de l’association pour rassembler des gens d’horizons divers qui partageaient néanmoins un point en commun : l’envie de découvrir l’histoire de la Nouvelle-France en écoutant l’auteur et conférencier Marcel Pronovost.
Le 16 avril dernier, environ 25 personnes ont donc pris place dans la salle familiale du Centre communautaire régional de London pour un voyage non seulement dans le temps mais aussi dans l’espace, puisque la Nouvelle-France fut une colonie aux dimensions d’un empire. Ce n’était pas la première fois que Marcel Pronovost visitait les francophones de London : un an plus tôt, presque jour pour jour, il avait offert une présentation de son premier ouvrage portant sur son ancêtre, une occasion d’évoquer à grand trait l’histoire française en Amérique. Cette fois, c’est le récit de l’épouse de son ancêtre, Jeanne Guillet, que l’auteur a couché sur papier. Une nouvelle page dans le récit de sa famille lui a donc permis de mettre en lumière la société d’alors sous un angle différent.
C’est d’abord par un portrait général de la Nouvelle-France du XVIIe siècle que l’auteur a débuté sa conférence. Suite à la brève occupation de la colonie par les Anglais, consécutive à la conquête des frères Kirk en 1629, la France réalise l’importance de ce territoire pour ses besoins et décide d’y investir davantage en colons et en soldats. Il est bien connu que la traite des fourrures a longtemps été au cœur du commerce entre la métropole et sa colonie et tout ce qui entoure l’univers des coureurs des bois fut central dans la vie du couple Rouillard-Guillet.
La majorité des enfants ont adopté des surnoms. L’un a préféré se faire connaître sous le nom de Pronovost, un patronyme qui est resté et qui est celui de l’auteur. Pourquoi cette distance entre le père et les enfants? Il est impossible d’en connaître la raison exacte mais la nuée de créanciers qui tournaient autour de la famille Rouillard n’a certainement pas aidé. C’est pour son mariage que le père contractera sa première dette et, obligé d’emprunter de temps à autre pour survivre, il dut travailler d’arrache-pied comme marchand de fourrure pour subvenir tant bien que mal aux besoins de sa famille et tenter de se libérer du cycle de l’endettement. Ses pérégrinations sont assez biens connues de par les actes notariés et les procès dans lesquels il est cité. « La raison pour laquelle je connais si bien mon ancêtre, c’est qu’il était toujours en cour », blague Marcel Pronovost. C’est finalement en Louisiane, au fort de La Boulaye dans le delta du Mississippi, là où la traite des fourrures l’avait conduit, que Mathieu Rouillard expire en 1702.
Ce n’est que deux ans plus tard que la nouvelle de sa mort a atteint la région de Batiscan, où vivait sa famille. Jeanne Guillet survivra plus de 20 ans à son mari. C’est sa vie qui est relatée dans le deuxième livre de Marcel Pronovost, surtout son vécu de veuve. Elle aussi multipliera les procès, et les aléas de sa vie familiale sont développés dans le récit qu’en fait l’auteur. Le désir d’indépendance de cette vieille femme, la gestion de ses avoirs, les mariages d’intérêt de ses enfants, un peu tout est passé au peigne fin dans Jeanne Guillet – La veuve Rouillard. À la fin de la conférence, M. Pronovost a relaté son voyage en Louisiane, ses contacts avec les archivistes et historiens locaux et a répondu aux questions du public.
Feu et Lieu, le premier ouvrage de Marcel Pronovost, a rencontré le succès auprès du public au point où il fut traduit en anglais. M. Pronovost est très sollicité en cette année du 400e anniversaire de la présence française en Ontario et le soir même de son passage à London, il se rendait à Cambridge offrir une conférence sur le même thème. La visite de l’auteur dans la région a d’ailleurs été rendue possible grâce à un partenariat entre le Cercle des copains et le Centre communautaire francophone de Cambridge.
Photo: Le conférencier Marcel Pronovost