Les conseillers municipaux de London ont adopté, en séance extraordinaire, le 1er mai, le vote préférentiel. La cinquième ville de l’Ontario est ainsi la première municipalité canadienne à choisir ce mode de scrutin.
Lors de la prochaine élection, le 22 octobre 2018, les électeurs ne sélectionneront plus seulement un nom mais en classeront plusieurs par ordre de préférence. Tous les votes seront comptés et, si aucune majorité absolue ne se dégage, le candidat ayant le plus petit nombre de voix sera éliminé. Les bulletins de vote seront recomptés, en utilisant le prochain choix de candidats parmi les bulletins où le candidat de premier choix a été éliminé. Le processus sera répété jusqu’à ce qu’un candidat obtienne plus de 50 % des suffrages.
En obligeant le candidat à obtenir une majorité absolue, ce système vise à renforcer la légitimité du futur maire (et des conseillers municipaux) et à limiter le « vote utile » consistant à choisir celui qui a le plus de chances de l’emporter plutôt que celui que l’on préfère réellement.
« Cette initiative correspond à l’arrivée d’une nouvelle vague de conseillers municipaux désirant moderniser la vie publique, constate David Heap, professeur de linguistique à l’Université Western Ontario. La plupart de l’ancienne garde, plus soucieuse de rester en place, a massivement été balayée lors des dernières élections en 2014, ouvrant la voie à un renouvellement des pratiques politiques. »
L’universitaire du Département d’études françaises voit dans ce mode de scrutin un acquis démocratique intéressant pour les électeurs comme pour les candidats. « Cela va changer la donne en favorisant une participation plus large car chaque communauté pourra présenter son candidat sans nuire à l’autre. Aucun vote perdant ne sera pas perdu. Le système antérieur conduisait à des choix difficiles, souvent au détriment des minorités visibles et des femmes. C’est une tendance historique lourde. Les communautés étant désormais mieux représentées, les électeurs communautaires seront plus enclins à se déplacer aux urnes. »
C’est aussi un moyen d’assainir les campagnes électorales, analyse-t-il. « Cela va changer la façon de faire campagne. Les alliances stratégiques dans l’ombre et les postures parfois agressives vont faire place à des coalitions claires, civiques, constructives, propices au débat de fond et à la démocratie. Les candidats dont le point de vue sera proche devront collaborer plutôt que se concurrencer. »
Ce changement de scrutin a un coût : 322 500 $. Une somme rondelette investie dans le changement des machines et de logiciels de comptage, la formation du personnel et une vaste campagne de sensibilisation des électeurs. Ces derniers vont devoir s’habituer à cette petite révolution démocratique dans une ville pionnière, qui sera observée à la loupe par les 443 autres municipalités ontariennes, lors des prochaines échéances électorales.
Photo : London est la première ville canadienne à choisir ce mode de scrutin.
Le docteur David Heap, professeur de linguistique à l’Université Western Ontario.