Cette semaine, place à la nouvelle, ce récit bref où l’auteur campe peu de personnages qui évoluent rapidement dans une intrigue dont le dénouement s’avère parfois inattendu. Place à trois recueils publiés par les Éditions Triptyque.
Maude Déry, Sur le fil, nouvelles, Montréal, Éditions Triptyque, 2013, 116 pages, 18 $. Originaire de Campbellton (N.-B.), Maude Déry publie son premier recueil de nouvelles, composé de quinze textes articulés autour du thème de la perte. Il est question de la perte d’un enfant qui « ne voulait pas d’un père qui brûle ses nuits à l’alcool et d’une mère caissière, sans ambition ». Une nouvelle raconte la perte d’un idéal, la quête d’amour : une « pauvre dinde » cherche à « oublier toutes les nuits où elle a cru à l’amour ».
La perte d’un parent est toujours triste et s’accompagne souvent de souffrance. Maude Déry illustre se tourment de la vie en faisant ressortir que la douleur d’une telle perte réside parfois (souvent) dans « la peur d’oublier ». Tous les personnages de ses nouvelles se tiennent sur le fil raide des aléas de la vie. Certains se laissent dévorer par leurs démons, d’autres trouvent la force de se relever.
Jérémie Leduc-Leblanc, La désolation, nouvelles, Montréal, Éditions Triptyque, 2013, 178 pages, 20 $. Voici une collection de textes qui illustre à quel point « écrire est apprendre à marcher sur des poutres, sans craindre le vide sous nos pieds ». Il est tour à tour question des petits détails qui constituent la plus grande catastrophe d’une vie et du « silence tonitruant du vide ». À l’heure des accommodements raisonnables et de la charte des valeurs québécoises, l’auteur campe une jeune juive qui « s’engouffre lentement… dans une faille du réel, une faille entre un ici et un là-bas, un maintenant et un déjà dont elle ne connaît pas l’issue ».
Comme la crème caramel côtoie la crème brûlée sur un menu, les personnages hétérosexuels et homosexuels se succèdent allègrement dans ce recueil de nouvelles. L’une d’elles met en scène un hétéro qui fait son… coming out. Plusieurs textes de cet ouvrage portent des titres anglais, parfois espagnols. Partout, on voit des êtres rongés par la solitude et la sensation d’être en trop ou de trop, nulle part chez soi, en décalage avec le réel.
Mœbius, no 138, « Québec, ville insolite », numéro piloté par Marie-Ève Sévigny, Montréal, Éditions Triptyque, automne 2013, 186 pages, 12 $. Voici une vingtaine de textes qui sont « le meilleur pied de nez à faire aux êtres sans mémoire ni imagination ». Comme le dit Patrick Nicol, « on haït Québec pour la raison même qu’elle est adorable ».
Sabica Senez signe une des plus courtes nouvelles (une page), une des plus émouvantes aussi. Son texte est tellement finement ciselé qu’on ne peut qu’espérer que le suicide décrit soit purement fictif. Le recueil renferme aussi quelques poèmes sur Québec. Cet assemblage de prose et de poésie confirme qu’on peut « quitter le cliché au profit de l’étonnement (et) imaginer d’autres personnages que le maire Labeaume ».