Non, le Carrefour des femmes n’est pas passé à côté de la Journée internationale de la femme, mais des considérations d’ordre logistique ont repoussé l’organisation d’une activité au vendredi 23 mars. L’attente n’aura pas été vaine puisque le gala de l’organisme aura, sous le thème « La francophonie au féminin », permis à un grand nombre de participants de s’amuser tout en soulignant l’apport des femmes au développement des services en français au cours des 100 dernières années.
C’est à guichet fermé que ce rassemblement festif s’est tenu au Hellenic Community Centre, à London. Le Carrefour des femmes, avec l’appui de quelques partenaires, s’était assuré de pouvoir en mettre plein la vue aux nombreux amis et sympathisants de l’organisme et de la cause qu’il représente. Ainsi, un groupe de jeunes danseuses de l’Elan Dance Arts a offert une prestation dynamique en guise d’ouverture à la soirée.
« Nous sommes ici pour reconnaître et célébrer la contribution de la femme dans la francophonie ontarienne », a annoncé d’emblée Émilie Crakondji, directrice générale du Carrefour des femmes. Rita Giroux-Patience, lui a emboîté le pas pour lire les lettres de Marie-France Lalonde, ministre des Affaires francophones, et Peter Fragiskatos, député fédéral de London-Centre-Nord, qui tous deux ont transmis leurs vœux et souligné l’importance de cet événement.
Au chapitre des discours, Peggy Sattler, députée provinciale de London-Ouest, a profité de son passage au micro pour rappeler qu’en 2016, le parlement ontarien a adopté une loi faisant du 29 janvier le Jour de la bataille des épingles à chapeaux, un thème qui reviendra plus tard au cours du gala. De son côté, Teresa Armstrong, députée de London-Fanshawe, a souligné que c’était un honneur que de s’associer à cette célébration et a partagé son admiration pour le travail du Carrefour des femmes.
Pour clôturer la parenthèse politicienne de la soirée, la conseillère municipale Anna Hopkins a insisté sur le rôle vital des femmes dans la préservation du français et son collègue à la table du conseil, Stephen Turner, s’est exprimé, à la surprise de plusieurs, dans la langue de Molière : « Ici, à London, nous sommes dans une région tellement anglophone. C’est difficile parfois pour les femmes de trouver des services en français et c’est pourquoi le Carrefour est si important ».
Après un mot de Nicole Buteau, présidente du Carrefour des femmes, pour remercier les participants d’être venus en si grand nombre, Béalem Gondjé, représentant de la Communauté Centrafricaine Söngö-Canada, a rendu hommage aux femmes africaines. Profitant du large auditoire à sa portée, Paul Levac, agent de planification à l’Entité 1, a fait la promotion de la consultation sur les services en français et invité les francophones à remplir le sondage sur le site mavieenfrancais.ca. Quant à Mme Crakondji, elle a remercié et nommé chacun des nombreux partenaires communautaires, tant francophones qu’anglophones, de l’organisme, de même que ses bailleurs de fonds.
Après le souper, une résidente de London bien connue de ceux qui fréquentent tant soit peu la communauté francophone, a pris le micro pour faire le récit des femmes franco-ontariennes des 100 dernières années. Par le biais de son propre parcours, Julie Chalykoff a mis en lumière des exemples de femmes engagées d’hier à aujourd’hui qui ont fait avancer la cause du français.
Ainsi en est-il de ces mères de famille nombreuse qui, jadis, ont permis à des régions entières de devenir majoritairement francophones et Mme Chalykoff, née à Hearst dans une famille de 18 enfants, en sait quelque chose. Même chose en ce qui concerne l’éducation, domaine où des femmes telles que Dolores Roberge, Jeanne Lajoie et, bien sûr, les sœurs Diane et Béatrice Desloges, entrées dans la légende pour avoir défendu leur école avec des épingles à chapeau contre l’application du Règlement XVII, ont assuré la préservation d’un système scolaire en français. Pour Mme Chalykoff, c’est grâce à ces femmes si elle a pu étudier dans sa langue à l’élémentaire.
Malheureusement, à l’époque, il en allait autrement du cycle secondaire et la conférencière a raconté avoir dû fréquenter le système anglophone. Ce petit détour biographique lui a permis de présenter une des pionnières de l’enseignement secondaire en français, Pia O’Leary, qui, à London au tournant des années 1970, s’est attelée à la création de programmes francophones et a innové pour accroître l’attachement des jeunes Franco-Ontariens à leur culture. Les années 1990 ne furent pas moins riches au plan des avancées en matière d’éducation puisque c’est au cours de cette décennie que furent créés le Collège des Grands Lacs, le Collège Boréal et les conseils scolaires francophones, des innovations associées à une autre grande dame, Mariette Carrier-Fraser.
Comment ne pas parler des femmes sans parler du secteur hospitalier? Un exemple vient facilement à l’esprit, celui de l’Hôpital Montfort, fondé par la congrégation des Filles de la Sagesse et rescapé par Gisèle Lalonde. Et que dire des services sociaux, des organismes communautaires, des programmes culturels? Angélina Villeneuve, Pauline Charron, Ghislaine Sirois, Ajà Besler et combien d’autres ont bâti et continuent à façonner l’Ontario français comme l’a rappelé Julie Chalykoff en guise de conclusion.
C’est d’ailleurs pour rendre hommage à quelques femmes méritantes du Sud-Ouest que des certificats d’appréciation leur ont été remis. Violette Poirier-Beckhoff, Diane Dubois, Svetlana MacDonald, Huguette Habel, Hélène Vaillancourt, Pia O’Leary et Émilie Crakondji se sont fait honorées de la sorte pour leurs nombreuses années d’implication au sein de la communauté francophone. Puis, la soirée s’est poursuivie en danse et en musique.
C’est donc sous le signe de la reconnaissance que s’est déroulé ce gala mais aussi du divertissement, puisqu’en considérant les progrès accomplis dans l’avancement des droits des Franco-Ontariens, il y a en effet bien des raisons de célébrer. Mais, comme ne manqueraient pas de le rappeler de concert les porte-étendards respectifs des causes francophone et féministe, il y a encore du chemin à faire, et le gala du Carrefour des femmes rappelait également cette réalité.
PHOTO : La soirée organisée par le Carrefour des femmes s’est avérée très populaire.