Le 15 août, fête de l’Assomption, constitue la fête nationale des Acadiens. Bien entendu, de nombreuses communautés des Maritimes sont, chaque année, le théâtre de célébrations hautes en couleur, mais la diaspora acadienne étant importante, la fête est aussi soulignée dans bien d’autres villes du Canada et des États-Unis.

Le Centre-Sud-Ouest ontarien compte ainsi bon nombre d’Acadiens, que des considérations professionnelles ou familiales ont conduit à s’établir dans cette région. Comme la plupart des leurs, la date du 15 août réveillera sans doute en eux la fibre nationaliste et la fierté de leurs ancêtres et de l’histoire qu’ils incarnent.

Mais quelle est donc l’origine de cette fête? On le sait, 1755 a sonné le glas de cette communauté française qui vivait un peu hors du temps et à l’écart du monde depuis le Traité d’Utrecht qui l’avait placée sous la coupe de l’Angleterre. Les déportations ont décimé cette société qui est passée bien près de disparaître et il lui a fallu quelques générations pour se ressaisir.

La seconde moitié du XIXe siècle marque d’ailleurs le début de ce réveil acadien. La Convention nationale acadienne de Memramcook, au Nouveau-Brunswick, tenue en 1881, constitue le premier de ces 10 rassemblements qui, jusqu’en 1937, jetteront les bases du renouveau de ce peuple bien décidé à survivre. C’est à l’occasion de cette convention originelle que s’est posée, pour la première fois, la question des symboles dont les Acadiens devraient se doter pour renforcir leur sentiment d’appartenance.

Comme des liens s’étaient récemment tissés, peu de temps auparavant, avec les nationalistes du Québec, certains délégués ont suggéré que saint Jean-Baptiste soit également considéré comme le patron des Acadiens et que le 24 juin devienne aussi leur fête. En rassemblant ainsi deux peuples sous des symboles communs, cela permettrait, avançaient-ils, de les unir et de donner plus de force aux Acadiens qui autrement disposeraient de bien peu de moyens pour faire valoir leurs droits. Qui plus est, selon eux, malgré les différences qui les séparent, les Canadiens français et les Acadiens partagent une même origine et la même langue, ce qui justifierait de faire cause commune.

D’autres, cependant, misaient plutôt sur la fête de l’Assomption de Marie. Vouloir préserver le caractère distinct des Acadiens plutôt que de risquer de le noyer dans le Canada français rendait nécessaire, selon eux, la naissance d’une célébration nationale elle aussi distincte. Qui plus est, le choix de cette journée s’explique d’une part par la dévotion à Marie fort répandue parmi les Acadiens et, d’autre part, par le fait que la colonisation de ce territoire a réellement débuté sous Louis XIII.

En effet, ce roi de France a fait consacrer son royaume à la Sainte Vierge en plus d’avoir enjoint ses sujets, en 1637, à faire une procession dans toutes les paroisses le 15 août afin de demander à Dieu d’accorder un héritier au couple royal, sans enfant après une vingtaine d’années de mariage. L’année suivante naissait Louis XIV.

Au temps de la Nouvelle-France, l’Assomption n’était pas encore un dogme officiellement défini, mais faisait tout de même partie des certitudes de foi crues par tous les catholiques. Puisqu’il est évident que les Français qui s’établirent en Acadie à cette époque ont emmené avec eux leurs coutumes et croyances, les participants à la Convention nationale acadienne de 1881 jugèrent que la dévotion à l’Assomption faisait certainement partie de leurs bagages, d’autant plus que le roi lui-même l’avait au même moment popularisée. Après un long débat, le choix des délégués s’est donc porté sur la date du 15 août comme fête nationale, créant ainsi un lien durable entre l’Acadie et ses plus lointaines origines.

(Crédit photo: The Canadian Press / photographe Andrew Vaughan)