OTTAWA – Le fédéral doit s’assurer que l’argent envoyé aux provinces pour les services d’éducation à la petite enfance en milieu linguistique minoritaire est bel et bien utilisé à ces fins, selon un comité parlementaire.
Dans un rapport élaboré à partir des témoignages recueillis dans les communautés francophones de l’Ouest du pays, le comité permanent des langues officielles recommande au gouvernement de créer une nouvelle politique visant à faire en sorte que les accords bilatéraux soient respectés.
Il ne s’agit pas, a insisté, le mardi 8 mai, le président du comité, le libéral Denis Paradis, d’ « empiéter sur les champs de compétence » des provinces et des territoires – car après tout, « dans ces accords fédéraux-provinciaux, ça veut dire que les deux ont signé ».
Les membres du comité parlementaire estiment que le fruit est mûr pour des pourparlers avec les partenaires provinciaux et territoriaux sur cette question.
« On s’est fait dire par les communautés que les planètes sont alignées pour rencontrer les provinces, parce que chacune des provinces et territoires canadiens ont présentement des ministres attitrés à la francophonie », a souligné son collègue René Arseneault.
La petite enfance est un moment déterminant pour intervenir afin d’assurer la survie du français dans les milieux qui baignent majoritairement dans l’anglais (et vice versa).
« C’est à ce stade du développement de l’enfant que débutent la construction identitaire et le développement du sentiment d’appartenance à la communauté » et « un sentiment de sécurité langagière », est-il écrit dans le rapport déposé mardi en Chambre.
Il en va par ailleurs du respect des droits linguistiques prévus dans la Charte canadienne des droits et libertés, a fait valoir le député libéral Darrell Samson.
« Ce sont des droits, quand même! Que mon enfant vive en Ontario, qu’il vive au Nouveau-Brunswick, qu’il vive en Nouvelle-Écosse ou dans l’Ouest, il a droit à une éducation de qualité en français », a-t-il lancé.
« Il y a une responsabilité, chez les provinces, de se prononcer, de travailler en collaboration », ajouté le député.
On note, dans le rapport, que l’article 23 de la Charte « n’inclut pas de manière explicite la petite enfance », mais qu’à l’époque de son adoption, « les programmes de prématernelle quatre ans et de maternelle cinq ans n’entraient pas en ligne de compte ».
Mais « ces programmes sont maintenant intégrés au mandat de l’école primaire et font partie intégrante de la programmation dans plusieurs juridictions provinciales représentant plus de 50 % des francophones vivant en situation minoritaire », précise-t-on.
Le comité suggère que la politique contienne « des clauses explicites sur la reddition de comptes qui engagent les provinces et les territoires à divulguer la part exacte des investissements qui revient aux (communautés linguistiques minoritaires) dans le cadre des ententes bilatérales ».
Les députés estiment qu’il serait possible d’en élaborer une qui respecte les champs de compétence de chaque juridiction sans provoquer de querelle. Ils tendent la main aux ministres provinciaux et territoriaux, qu’ils espèrent rencontrer prochainement afin de lancer le débat.
Le rapport, qui fait près de 70 pages, a l’appui unanime des députés de tous les partis qui siègent au comité. La ministre responsable du dossier des langues officielles à Ottawa, Mélanie Joly, a affirmé à son entrée à la période des questions qu’elle étudierait ses recommandations.
Elle a cependant tenu à mentionner que « pour la première fois, dans notre plan d’action sur les langues officielles, on a reconnu l’importance de la petite enfance » en allongeant une enveloppe de 20 millions $.
« On veut s’assurer qu’on puisse vraiment intégrer nos enfants dans la langue de la minorité pour s’assurer qu’après ils poursuivent leur éducation en français », a indiqué Mme Joly lors d’une mêlée de presse.
SOURCE : Mélanie Marquis, La Presse canadienne