Cent cinquante : c’est le chiffre magique, cette année. Peu d’institutions et d’organismes se priveront de souligner à leur façon le 150e anniversaire de la Confédération. Le Musée de London n’échappe pas à cette règle et présente, jusqu’au 23 avril, une exposition dont le thème porte sur l’art à London depuis 1867.

Voilà un sujet qui, de la part des organisateurs, nécessitait davantage de réflexion qu’il n’y paraît. Comme l’a expliqué en entrevue Brian Meehan, directeur général du Musée, il a d’abord été nécessaire de déterminer ce qu’est un artiste de London. Quelqu’un né dans cette ville ou quelqu’un qui, sans nécessairement y avoir vu le jour, y a exercé son art? Il a également fallu rester fidèle à l’idée originale de cette exposition qui était d’offrir un survol historique des arts plastiques à London. Puis, finalement, des considérations d’ordre esthétique ont pesé dans la balance pour offrir aux visiteurs le meilleur de la collection du Musée.

L’art, comme le reste de la société, évolue, et souvent de la même façon. Ainsi, de grandes tendances peuvent s’observer dans la façon dont les artistes de London ont exprimé leurs goûts, leurs idées et leurs perceptions de leur environnement. La fin du XIXe siècle et le début du XXe sont ainsi marqués par de fortes influences européennes et par un style très académique.

De l’entre-deux-guerres jusqu’aux années 1950, on constate par contre que les artistes canadiens s’ancrent davantage dans leur milieu et développent leurs propres spécificités. Développement d’une conscience nationale? Meilleure communication entre les grands centres qui offrent l’occasion de s’affirmer en se comparant et en s’inspirant de nouvelles idées? Cette évolution pourrait s’expliquer de diverses manières.

Les visiteurs auront la chance de voir des œuvres d’artistes célèbres illustrant les 90 premières années couvertes par l’exposition : F. M. Bell Smith, Paul Peel, Albert Templar, etc. Par la même occasion, ils constateront que les temps ont bien changé…

Cela est d’autant plus évident lorsque l’on aborde l’époque qui suit. Les années 1960 ont vu l’apparition d’un phénomène presque unique à London : le régionalisme. Cette école de pensée teintée de militantisme délibéré cherchait à libérer les artistes de leur dépendance aux grandes villes perçues comme des jalons incontournables dans leur parcours professionnel. Mais pourquoi New York, Londres, Paris ou d’autres métropoles devraient être à ce point indispensables, se sont interrogé les régionalistes? De là l’idée selon laquelle l’environnement immédiat devrait être au centre de la créativité artistique.

Il semblerait que les nombreux artistes qui résidaient à London de la fin des années 1950 jusqu’aux années 1970 aient généré ce mouvement, d’autant plus que plusieurs d’entre eux avaient des opinions bien marquées. On n’a qu’à penser, entre autres, à Greg Curnoe, Tony Urquhart et Jack Chambers.

L’époque contemporaine constitue la troisième période historique mise en valeur dans cette exposition dont les œuvres sont disposées de façon chronologique. Comme pour tout ce qui est actuel, il est un peu difficile de prendre du recul pour juger du travail de ces artistes qui côtoient toujours les résidents de London et dont plusieurs enseignent à l’Université Western. On peut tout de même en dire qu’ils ont des styles distincts, les uns très réalistes, les autres très éclatés. Le souci du détail semble être important pour eux, tout comme leur approche très personnelle.

Des œuvres de John Boyle, Kim Moodie, Sky Glabush et d’autres figurent dans cette sélection illustrant le présent, et peut-être le futur, des arts visuels à London.

Voilà donc un panorama des plus invitant pour quiconque est intéressé à découvrir l’imagination débordante des créateurs de la région. Il est intéressant de constater que London a su se démarquer à sa façon depuis si longtemps.

Philippe Thivierge