Ce n’est pas tous les jours que les chercheurs d’emploi du Sud-Ouest apprennent une bonne nouvelle. Celle-ci viendra peut-être en soulager quelques-uns, après tant d’annonces de fermeture : Atelka, une entreprise basée à Montréal, inaugurera en mars un centre d’appels dans le Western Sarnia-Lambton Research Park. Plus de 300 postes à temps plein seront ainsi ouverts. Atelka tiendra une foire de l’emploi sur les lieux le 31 janvier de 11 h à 21 h et le 1er février de 10 h à 18 h. Les futurs employés travailleront pour l’essentiel au service à la clientèle de langue anglaise pour une grande entreprise dont Atelka gère les relations avec ses consommateurs.
Travailler dans un centre d’appels vaut bien mieux que d’être sans emploi et de craindre constamment d’être à court d’argent. Cependant, plusieurs s’interrogeront : est-ce véritablement un choix qui en vaut la peine? Ce type d’emploi ne représente-t-il pas un cul-de-sac professionnel? En fait, il se pourrait que ce soit pire qu’une simple question d’orientation de carrière, si l’on en croit un sondage mené par deux professeurs de l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal dans trois importants centres d’appels québécois. Commanditée par le Syndicat canadien de la fonction publique et publiée au début du mois, l’étude démontre que 57 % des employés de ce secteur montrent des signes de détresse psychologique importants ou très importants, soit trois fois plus que la moyenne québécoise.
Les raisons? Le manque d’autonomie, la monotonie des tâches, l’exigüité de l’espace mis à la disposition des travailleurs, la surveillance trop étroite, des critères d’évaluation trop sévères, le bruit assourdissant, la grande charge de travail, etc. Ces désagréments amèneraient 46,4 % des téléphonistes à consommer de façon régulière des psychotropes (médicaments pour réduire l’anxiété ou la nervosité; pour remontrer le moral ou pour aider à dormir). Qui plus est, plus de la moitié des employés en situation de détresse se seraient déjà absentés du travail pour des raisons liées au stress.
Pour avoir une juste appréciation de la situation, l’étude, menée par des enseignants d’une université réputée à gauche et commanditée par un syndicat, doit cependant être contrebalancée par un point de vue contraire. D’ailleurs, l’Association des centres de contacts clientèle du Québec n’a pas tardé à réagir à ce sondage. Son président, Spiros Malevitis, a décrit ses résultats comme étant exagérés. Concédant que l’étude pouvait être représentative de ce qu’étaient les centres d’appels d’il y a une décennie, il a toutefois insisté sur les améliorations que les entreprises ont depuis mises en place. Un coup d’œil sur les offres d’emploi en centre d’appels permet en effet de constater que certaines compagnies offrent des avantages sociaux et des salaires compétitifs. Du côté du Syndicat canadien de la fonction publique (qui, en dépit de son nom, compte aussi dans ses rangs des travailleurs du secteur privé), les résultats de l’enquête ont entraîné une intervention rapide auprès du patronat pour améliorer le sort des téléphonistes. Des trousses de sensibilisation ont également été remises aux employés des centres d’appels.
Les choses commenceraient-elle à changer pour ces travailleurs? Ceux qui à l’avenir travailleront dans ce domaine seront peut-être à l’emploi de petites entreprises où l’oppression est moins pesante, ou seront des travailleurs plus qualifiés offrant un service spécialisé. En effet, les centres d’appels sont de plus en plus souvent délocalisés dans les pays en développement, parfois au grand dam des clients qui peinent à comprendre un accent avec lequel ils ne sont pas familiers. Les 300 personnes qui se trouveront sous peu un emploi à Sarnia chez Atelka n’auront donc pas seulement la chance de travailler mais offriront un service que la clientèle aurait tort de mésestimer.