Il ne s’agit probablement que d’une coïncidence, mais en cette saison où l’Halloween constitue la fête populaire la plus importante, la Galerie d’art Alix, à Sarnia, présente une exposition rappelant l’univers des légendes, de la sorcellerie moderne et des mystères en tous genres. In the Shadow of the Millenium est le titre de cette collection qui, jusqu’au 1er janvier 2017, rassemble 37 oeuvres de 15 artistes aux talents très divers.

Comme c’est souvent le cas avec l’art contemporain, la compréhension d’une oeuvre relève souvent de l’intuition, et c’est aussi le cas du titre de l’exposition. Qu’est-ce qui peut bien se trouver « dans l’ombre » de ce troisième millénaire entamé en grande pompe il n’y a pas si longtemps? En cette époque où la science, la technologie et l’internet règnent en maîtres, ce sont sans doute les superstitions d’un autre temps, les mythes folkloriques et les croyances issues du fond des âges qui reviennent en force, notamment par le biais de la Wicca, cette religion néo-païenne faisant de plus en plus d’adeptes.

En parcourant l’exposition, le visiteur se trouve confronté à différents concepts qui empruntent aussi bien à l’écologie qu’au surnaturel. Sans être liées par des dogmes bien définis, les idées maîtresses de l’exposition forment un continuum envoûtant, interpellant davantage les sens et l’imagination que la raison.

D’entrée de jeu, en entrant dans la première salle, c’est à une œuvre de grandes dimensions que l’on est confronté et qui donne le ton de la visite. Ladies Sasquatch, d’Allyson Mitchell, est constitué de six énormes mannequins de tissus aux traits simiesques et menaçants, rassemblés autour d’un feu de camp d’où sont diffusées une musique et une trame sonore qui laissent pour le moins inconfortable. Toute la salle est d’ailleurs peuplée de monstres et de créatures fantomatiques. Les délicates statuettes de porcelaine façonnées par Shary Boyle en impressionneront plus d’un par leurs innombrables détails, mais, comme le reste, se distinguent par leur thématique bizarre et glauque. The Rejection of Pluto et To Colonize the Moon en sont de bons exemples. Dans le département très abstrait et éclectique, le collectif FASTWÜRMS propose C.A.T. Workstation, une installation qui en laissera plusieurs interloqués.

Il ne s’agit là que de quelques exemples d’œuvres se trouvant dans la première salle, mais bien des surprises attendent encore les visiteurs dans la seconde. Plongée dans la pénombre, celle-ci contient quelques-unes des œuvres les plus intrigantes.
Avec Pyramid et Fortress, Camille Jodoin-Eng joue des effets de la lumière et du plastique translucide pour créer des formes indéfinissables, à mi-chemin entre l’espace et le monde du rêve.

De son côté, l’artiste Emily Pelstring semble manifestement avoir un faible pour l’horreur et le registre cinématographique qu’il inspire. Ses œuvres ont toujours une composante vidéo et, grâce à une technique à la fois simple et ingénieuse, elle parvient à créer des effets 3-D dans certaines de ses créations. Ainsi, dans Sleepers, deux mains spectrales sortent du plancher d’une maquette de salon où se trouvent deux jeunes filles endormies.
L’art contemporain, souvent jugé sibyllin, n’est certes pas au goût de tout le monde, mais cette exposition s’avère largement accessible. L’imagination débordante des artistes sélectionnés pour l’occasion vaut le détour.