Le transport maritime a toujours comporté sa part de risques, encore plus hier qu’aujourd’hui. Les Grands Lacs, en apparence si paisibles, ont eu leur lot de tragédies au cours des siècles : les estimations varient, mais le nombre de navires de toutes sortes y ayant sombré se chiffrent par milliers, et les vies perdues en dizaines de milliers.
Certains de ces drames ne sont connus que par les antiques épaves qui en témoignent, les archives étant muettes quant à ce qui put se passer. D’autres incidents sont en revanche bien documentés : ainsi, le plus imposant bateau à avoir coulé dans cette région fut le SS Edmund Fitzgerald, le 10 novembre 1975. Une tempête sur le lac Supérieur a eu raison de ce cargo de 222 mètres de long et aucun de ses 29 hommes d’équipage n’y a survécu.
Parlant de tempête, il est un événement qui à lui seul est passé à l’histoire pour avoir été une des pires catastrophes naturelles qu’aient connues l’Ontario et le Midwest américain. Du 7 au 10 novembre 1913, un blizzard destructeur s’est abattu sur les Grands Lacs, coulant 12 bateaux alors qu’une trentaine d’autres s’échouaient sur les rives. Les vents d’une force comparable à celle d’un ouragan ont endommagé plusieurs autres embarcations de même que des infrastructures en bordure du rivage.
Environ 250 personnes ont perdu la vie dans cette catastrophe.
C’est plus particulièrement le lac Huron qui a été touché en termes de pertes matérielles et humaines. Parmi les pires pertes figurent le James Carruthers, un navire canadien de 170 mètres, construit à Collingwood, qui a sombré avec son équipage de 22 hommes et sa cargaison de blé.
Il n’y a pas que des navires marchands qui sommeillent aujourd’hui au fond des Grands Lacs. Des navires de guerre aussi. C’est dans le lac Ontario que l’on trouve ainsi deux célèbres épaves remarquablement bien conservées et qui datent de la guerre anglo-américaine de 1812-1815.
Ce ne sont cependant pas les boulets de canon qui ont envoyé le Scourge et l’Hamilton par le fond, mais de grands vents, le 8 août 1813, à 11 kilomètres au nord-ouest de St. Catharines. Leurs épaves sont désignées, depuis 1976, comme lieu historique national du Canada et des mesures strictes sont déployées pour assurer leur protection : il est non seulement interdit de faire de la plongée sans autorisation pour les visiter, mais aussi de pêcher à proximité. Un radar a même été installé sur la rive pour surveiller les allées et venues en surface.
Des précautions semblables ont été prises pour protéger les restes de l’Atlantic, une des nombreuses épaves gisant autour de ce mince ruban de sable et de marais qui s’étire dans le lac Érié et qui forme aujourd’hui le parc de Long Point. Cependant, ce ne sont pas les risques imposés par la géographie locale au trafic maritime qui ont eu raison de l’Atlantic mais une bête collision.
Dans la nuit du 20 août 1852, le bateau, qui avait quitté Buffalo à destination de Detroit, a été heurté par un autre navire qui venait en sens inverse. Conçu pour transporter 300 passagers, l’Atlantic en avait à ce moment près du double, pour l’essentiel des immigrants européens, une manne pour les entreprises maritimes du temps.
Surchargé de passagers et de bagages, opéré par un équipage peu diligent, le navire a tôt eu fait de sombrer dans des circonstances épouvantables. Comme aucun registre n’avait été tenu du nombre exact de personnes à bord, le nombre de pertes humaines fait l’objet de débats, mais est généralement estimé à 250, constituant en cela une des plus grandes tragédies de l’histoire des Grands Lacs.
Les récits de naufrage semblent appartenir à l’histoire ancienne et il est vrai que les accidents maritimes meurtriers sont aujourd’hui rares, à tout le moins sous nos latitudes. La technologie et la réglementation relative à la sécurité y sont pour quelque chose et, souvent, ce sont ces mêmes tragédies du passé qui ont contribué à sensibiliser le public à la nécessité de ces avancées.
PHOTO (Crédit : Greenmars) – Le SS Edmund Fitzgerald, le plus gros bateau à avoir coulé dans les Grands Lacs